Il y a quinze jours au Salon Primevère de Lyon, j’ai assisté à quelques conférences sur l’agriculture et l’environnement. Avec Marc Dufumier, j’ai eu un exposé synthétique sur certains dysfonctionnements de l’agriculture dans le monde que je vais tenter de vous retranscrire. C’est carrément ardu comme tâche mais j’espère vous donner un premier aperçu de la pensée de ce grand monsieur.
Marc Dufumier est agronome et professeur d’agriculture comparée. Une petite biographie retrace son parcours sur Wikipédia. Il est intervenu au Salon Primevère dans le cadre du Prix du livre Environnement. Ce prix décerne, au niveau de la région Rhône-Alpes, un livre qui met en avant une réflexion pédagogique sur des thématiques environnementales d’actualité. Le nouveau livre de Marc Dufumier, 50 idées reçues sur l’agriculture et l’alimentation est un des huit livres sélectionnés cette année.
Pour sa conférence au Salon Primevère qui devait durer 45mn maximum, Marc Dufumier s’est concentré sur les deux grandes idées qui marquent l’ensemble de son travail de chercheur : repenser les échanges agricoles Nord/Sud et les modes de production agricole.
Repenser les échanges agricoles Nord/Sud
Première idée fausse à déconstruire en urgence pour Marc Dufumier :
Les pays industriels doivent nourrir le « Sud » car ces derniers ne peuvent pas subvenir à leurs besoins.
Cette idée est alimentée par les industries agro-alimentaire qui soutiennent que seule l’agriculture industrielle demandant beaucoup d’investissements permet de nourrir l’ensemble de la planète. Ils relèguent allègrement l’agro-écologie à une préoccupation de riches.
Qu’est-ce qu’on entend par subvenir à leurs besoins ?
On estime qu’il faut 200kg d’équivalent céréales (incluant pomme de terre, manioc) par habitant par an afin de se nourrir correctement. Or au niveau mondiale, l’agriculture produit déjà 330kg équivalent céréales par habitants par an. Il est donc clair que la nourriture est déjà produite en quantité suffisante, il y a même du surplus. Pourtant, les chiffres sur la faim dans le monde sont horrifiants : 800 millions de personnes sont en situation de famine et 1 milliard serait en situation de carences nutritives.
Où vont les 130kg équivalent céréales en excédent ?
Trois postes : gaspillage, alimentation du bétail, élaboration de biocarburant comme l’éthanol.
Idée fausse sous-jacente à ce constat : ces populations seraient trop pauvres pour avoir accès à la nourriture, elles ne peuvent pas produire elles-mêmes leur nourriture. Le Nord se doit donc de produire pour le Sud à moindre coût.
Avec un tel raisonnement, il est aisé d’aller inonder par exemple le Sénégal avec de la poudre de lait européenne qui se retrouve être moins chère que ce que peuvent produire en lait les paysans sénégalais. Comme à Madagascar où un sac de riz produit par un paysan malgache demande 200 fois plus de temps agricole qu’en Europe, le sac de riz européen est alors moins cher.
Quelles solutions apportées par Marc Dufumier ?
Produire mieux, c’est la solution pour éviter les échanges commerciaux inégaux.
Augmenter les rendements à l’hectare est possible sans grignoter encore plus sur les espaces naturels (forêts primitives, zones humides par exemple).
50 idées reçues sur l’agriculture et l’alimentation, interview du 26 février 2015 dans le Magazine de la Santé, France 5
L’agriculture « intensive » naturelle
La parade à l’extension dévastatrice de l’agriculture industrielle est une forme d’agriculture optimisant l’environnement. Marc Dufumier s’amuse à appeler cette agriculture, « l’agriculture intensive » en ce sens qu’elle utilise massivement l’énergie solaire et plus globalement les écosystèmes en place pour augmenter les rendements. C’est la partie technique agronomique de ce que Pierre Rhabi a appelé l’agro-écologie et c’est exactement l’idée que le couple Bourguignon prône depuis une trentaine d’années.
Bon mais en fait, je vais vous laisser l’écouter, ça sera quand même mieux !
Petit cours d’agroécologie par Marc Dufumier
Bonne tisane !